Coup de gueule, coup de coeur, coup de blues… Dans cette rubrique diffusée à l’improviste, un journaliste du Média se saisit d’une question d’actualité tout en se gardant bien de se cacher derrière son petit doigt.
Avons-nous vraiment besoin des patrons ?
L’année dernière, alors que le premier confinement donnait à toute la bourgeoisie intellectuelle des envies de Révolution pour un « monde d’après » plein de bons sentiments, on se demandait dans les journaux et sur les plateaux télé si les personnes essentielles étaient en fait celles et ceux qu’on croyait. Car en un seul confinement national, tout ce que le pays comptait de « CSP plus », c’est-à-dire les cadres dirigeants, les DRH, les intellectuels, se retrouvaient chez eux ou dans leur résidence secondaire, les bras croisés.
Pendant ce temps, souvenez-vous, les « premiers de corvées » trimaient pour faire tourner les usines, les commerces essentiels, les hôpitaux ou encore les transports en commun. La bourgeoisie a eu la larme à l’œil face à ces gagne-petit que d’ordinaire elle ne voit jamais, Macron a concédé une petite prime défiscalisée, et hop, au charbon les gueux.
Le débat sur l’utilité des travailleuses et des travailleurs dans le pays n’aura duré que quelques semaines et c’est bien dommage. Mais encore plus ennuyeux : celui sur l’utilité de celles et ceux qui pouvaient rester chez eux en pleine crise pandémique n’a quasiment pas été abordé.
Même au plus fort du Covid, personne ne s’est demandé ce qu’il en était de l’utilité des patrons. Ils sont passés à travers les mailles de la critique de l’utilité sociale des professions, ce qui confirme ce qu’ils sont devenus, dans la France des années 2020 : des divinités intouchables, si sacrées que plus personne ne se permet de les critiquer.
D’ailleurs, ils ne sont plus des patrons mais des « entrepreneurs ». Quelle différence ? En pratique, aucune : ce sont ceux qui dirigent les entreprises de l’économie capitaliste. Dans les croyances, c’est la nouvelle lessive qui a repeint la bonne vieille bourgeoisie en héroïne des temps modernes : quand le patron domine, l’entrepreneur entreprend. Entreprend quoi ? La mise au travail des autres pour en tirer une plue value, pour lui et ses actionnaires.