Chaque semaine, Serge Faubert raconte l’actualité française à travers le prisme des délibérations au Sénat et à l’Assemblée nationale. Ce qui perce de l’esprit des lois et de l’équilibre des forces politiques, au-delà du jeu des petites phrases.
Municipales : gauche bobo contre gauche prolo
C’est donc la vague verte. Au vu des résultats, il serait saugrenu de contester sa réalité. Lyon, Bordeaux, Strasbourg Grenoble, Tours, Besançon, Poitiers, Annecy. Et Marseille samedi. Sans oublier qu’il s’en est fallu d’un cheveu pour que Lille tombe également dans l’escarcelle écolo.
C’est la première fois dans leur histoire que les verts dirigent 7 villes de plus de 100 000 habitants. Jusqu’à présent, ils n’en détenaient qu’une : Grenoble.
Pour autant, cette vague est singulière : elle touche essentiellement le cœur des grandes métropoles où résident les catégories les plus aisées de la population. Dans les zones périurbaines et dans les campagnes, la vague verte tient davantage du clapotis que du tsunami.
Certes, l’abstention a brouillé les cartes. 58, 4 %. 4 points de plus qu’au premier tour, le 15 mars.
Jean-Luc Mélenchon a vu dans ce comportement des élécteurs une « insurrection froide ». Mais cette révolte citoyenne ne se cantonne pas à la désertion des urnes.
À sa façon, le vote écolo acte lui aussi un divorce. Celui des classes moyennes et supérieures d’avec Emmanuel Macron.
Ralliées à la promesse macroniste après avoir désespéré du quinquennat Hollande, ces catégories aisées font maintenant le chemin inverse. Sans vouloir forcément regagner le bercail socialiste. Le dégagisme continue.
Le vote vert a joué le rôle de valeur refuge. Avec d’autant plus de facilité qu’il permet de faire l’économie de la question sociale. Il a la légèreté du consensus culturel et la saveur de la nouveauté. Les deux mois de confinement ont fait le reste :
C’est une nouvelle matrice qui se met en place. Dans les années 1970, le Parti socialiste de François Mitterrand théorisait un compromis entre la classe ouvrière et la bourgeoisie éclairée. La croissance semblait alors capable de satisfaire les revendications des uns et les appétits des autres.
Le compromis d’aujourd’hui pose lui aussi un intérêt commun. La préservation de la planète est l’affaire de tous et profite à tous.
C’est une évidence. Le dérèglement climatique ou la pollution ne font pas dans le détail.
Mais jusqu’où doit aller la remise en cause notre modèle de société ? C’est tout l’enjeu des batailles qui viennent.