« Carte blanche », c’est la rubrique du Média consacrée à nos coups de gueule, coups de cœur et à nos partis pris. À nos opinions, étayées par des faits scrupuleusement respectés mais éclairés par nos différentes sensibilités.
L'Histoire hypocrite : Macron, le 8 mai et Jean Moulin
Pour commémorer l’anniversaire de la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie le 8 mai 1945, le Président Macron a fait à Lyon un discours où il a non seulement rappelé le sacrifice de Jean Moulin et loué « l’esprit de résistance » qui caractériserait la nation française, mais aussi vanté les vertus de « la République » comme cadre politique selon lui toujours juste et nécessaire. L’historien Julien Théry revient, pour Le Média, sur les biais par lesquels le Président s’efforce ainsi, non sans discrets accents pétainistes, d’enrôler l’histoire et la mémoire au service de son entreprise d’imposition d’un projet néolibéral dont la société française ne veut manifestement pas.
Le projet macroniste est pourtant, à l’évidence, en contradiction complète avec le programme politique promu à l’époque par la Résistance et en particulier par son Conseil National (CNR), fondé par Jean Moulin en 1943. Avec la mise sur pied d’un organisme pour lequel il a choisi le même acronyme, le Conseil National de la Refondation, mais dont l’objectif est précisément de détruire l’héritage du CNR historique (services publics, sécurité sociale, retraites, interdiction de la concentration des média…), E. Macron n’a pas hésité, selon son habitude, à recourir à la manipulation.
De même, la célébration de la victoire sur les fascismes ‒ non seulement allemand et italien, mais aussi, on l’oublie vite, français, avec le régime de Vichy ‒ s’accorde mal avec la façon dont E. Macron et son gouvernement prennent grand soin de ménager l’extrême-droite, mènent une politique proche à bien des égards du programme du RN, et s’efforcent de mettre le travail au premier plan des valeurs, au détriment des intérêts des travailleurs dans le rapport de force avec le patronat... comme le faisait l’idéologie pétainiste. L’unanimisme national qu’E. Macron s’efforce de promouvoir entre bien plus en résonnance avec les valeurs maréchalistes qu’avec celles, émancipatrices, de la Résistance.