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Les conflits d'intérêt du ministre Dupont-Moretti
Le 13 janvier 2021, la Cour de Justice de la République (CJR) a ouvert une information judiciaire concernant le Ministre de la Justice Eric Dupont-Moretti. En cause, ses potentiels conflits d’intérêt : en tant qu’avocat, l’ancien ténor du barreau n’avait pas ménagé ses critiques envers les juges du parquet national financier (PNF). Devenu ministre, il n’a pas hésité à multiplier les inspections contre ceux qui, selon lui, s’étaient comportés comme des “cowboys” ou des “barbouzes”.
Comme le dénonce sur notre plateau Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la Magistrature (l’un des trois syndicats de la profession à l’origine de la plainte auprès de la CJR), il s’agit d’un attaque sans précédent contre l'indépendance de la justice et vis-à-vis de ces juges censés lutter contre la corruption politico-financière.
En effet, la liste de ceux qui sont visés par les inspections du nouveau garde des Sceaux a de quoi surprendre. On y retrouve ces magistrats du PNF impliqués dans l’affaire “des fadettes”, quand le parquet avait épluché les relevés téléphoniques de l’avocat Thierry Herzog pour repérer la taupe qui les avait informés, lui et son client Nicolas Sarkozy, de leur mise sous écoute dans le cadre de l’affaire Paul Bismuth (écoute comprenant plusieurs appels avec Dupont-Moretti). Dans le viseur, également : Edouard Levrault, ancien juge d’instruction à Monaco, qui avait eu le malheur de découvrir un scandale de corruption sur le rocher qui concernait entre autres l’un des clients de Dupond-Moretti. Celui-ci n’avait pas hésité à qualifier le juge de “cowboy”.
Si le ministre se défend de tout conflit d’intérêt, la situation est inédite et dangereuse pour les magistrats. Voilà un ministre qui, à peine nommé, utilise ses fonctions pour régler ses comptes d’avocat. Ne reste plus qu’à écouter l’avis de la CJR, qui devrait trancher d’ici quelques semaines.