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À contre-courant

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Accoucher autrement : femmes et sages-femmes veulent être considérées

Accoucher à la maison plutôt qu’en maternité est devenue une alternative envisageable pour des centaines de futures mamans. Depuis le début de la crise sanitaire, les appels auprès de ces sages-femmes à domicile ont triplé. Marine Manastireanu est partie à la rencontre de ces femmes, celles qui accouchent et celles qui les accompagnent.

Si Mathilde a accouché chez elle, ce n’est pas par accident mais par choix. Suivie et assistée par une sage-femme libérale, elle a mis au monde le petit Zaim, sans médicalisation. Un accouchement à huis clos, loin des couloirs bruyants de l’hôpital, cela semblait comme une évidence. Un choix souvent incompris dans le milieu médical. En France, ils représentent seulement 0,3% des naissances, une pratique méconnue, souvent jugée dangereuse. Pourtant, de nombreux pays, d’Europe du nord notamment, le pratiquent en toute sérénité. 

En France, ils sont autorisés pour les grossesses à bas risques, mais le prix de l’assurance pour ces libérales est prohibitif, et les risques de radiation sont quotidiens. Pratiquer l’accouchement à domicile devient alors une lutte pour faire évoluer les mentalités, mais aussi remettre en question des pratiques uniformisées à l’hôpital.  

Car si depuis les années 80 les progrès techniques et médicaux ont été exponentiels, les grands centres de santé ont été créés au détriment des petites maternités. La norme est alors devenue l’accouchement médicalisé, et parfois optimisé pour gagner du temps, avec des déclenchements pour accélérer et renforcer les contractions qui sont alors plus douloureuses, ou l’épisiotomie, une incision en bas du vagin pour faciliter le passage du bébé.

Une cascade d’actes médicaux que certaines femmes remettent en question aujourd’hui, Des actes pouvant aboutir à des accouchements traumatisants, voire à des violences obstétricales. C’est ce qu’a vécu Margaux. Elle a accouché de son premier enfant en septembre 2017, il y a trois ans. Un témoignage dur et toujours difficile à raconter pour elle : "Je l'ai vraiment vécu comme une agression, une maltraitance. Ça a été un enchaînement d'événements horribles, on m'a fait une expression abdominale, une épisiotomie à vif, etc... je n'ai jamais compris pourquoi on avait voulu presser mon accouchement comme ça en fait, on ne m'a jamais rien expliqué". 

Des témoignages comme celui de Margaux, Sonia Bisch de l’association Stop VOG, en reçoit des vingtaines par semaine. Des situations très différentes d’une maternité à l’autre. Mais si une grande majorité des femmes qui accouchent à l’hôpital sont satisfaites, le constat reste préoccupant d’après la militante : "Il y a des taux de césariennes, d'épisiotomie complètement disparates sur tout le territoire, il y a des abus de pouvoir et des actes médicaux qui sont pratiqués sans être nécessaires. Et d'un autre côté on recoud des périnées à vif sans anesthésie locale. Je reçois aussi beaucoup de témoignages de sages-femmes qui partent de l'hôpital car elles n'en peuvent plus de voir autant de violences".

Un récent sondage du collège national des sages-femmes montre que plus de 42% des cliniciennes salariées sont en burn-out. Des sages-femmes qui manifestent depuis de très nombreuses années pour réclamer plus de moyens et de reconnaissance.

Un manque de moyen qui n’est pas la seule cause d’après Anne Evrard, co-présidente du collectif Ciane ayant pour but d’accompagner les victimes de violence obstétricales dans leurs démarches juridiques. "On retrouve des témoignages de violences partout, et pas seulement dans les grandes structures qui sont toujours en pleine activité ou débordées. Il y a aussi une remise en cause de la douleur des femmes, qui est souvent minimisée voire ignorée."

Aujourd'hui, les alternatives à l'accouchement médicalisé sonnent alors comme une reprise en main des sages-femmes sur leur métier, mais aussi des femmes sur leur corps. Dans cette maison de naissance, une association rassemblant sages-femmes libérales et usagères, les patientes accouchent comme à la maison, tout en étant dans l’enceinte d’un hôpital pour être transférées en cas de complication.

Une collaboration entre différentes façons d'accoucher qui permet aussi à l’hôpital de faire évoluer ses propres pratiques, comme pour l’hôpital Pierre Oudot qui a intégré la maison de naissance Pham dans son enceinte.

Mais ces alternatives ne sont pas bien vues par tous les professionnels de santé hospitaliers, à commencer par le syndicat national des gynécologues et obstétriciens. Il publiait un communiqué de presse en décembre 2020, dénonçant un investissement dans ces structures sans évaluations préalables, alors même que l’hôpital manque urgemment de moyens. 

Des maternités qui restent plus que primordiales, en cas de complication mais aussi pour cette majorité de femmes qui souhaitent un accouchement avec péridurale. Des femmes qui demandent aussi une attention particulière, d’être écoutée et considérée, et pour cela il faut en donner les moyens aux personnels de santé hospitaliers.

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