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Henri Sterdyniak, signataire du manifeste des économistes atterrés, dissèque les choix économiques des gouvernants, débusque la propagande néolibérale et dévoile la logique prédatrice des multinationales.

Le gouvernement sacrifie votre santé sur l'autel du CAC40

La crise sanitaire provoquée par le coronavirus se traduit déjà par une forte chute de l’activité. C’est un choc d’offre : des entreprises doivent réduire leurs activités, faute de personnels, malades ou confinés  ; des commerces et des services doivent rester fermés. C’est un choc de demande puisque les personnes confinées réduisent fortement leurs dépenses. S’y ajoute une forte baisse de la Bourse (qui heureusement a peu d’impact en France où les fonds de pensions sont peu répandus) et une chute de l’investissement des entreprises en période de grande incertitude.

Face à la chute de l’activité économique, le gouvernement a pris des mesures dites de soutien. Celles-ci ont avant tout l’objectif de soutenir les entreprises. Il ne prévoit que 11, 25 milliards de dépenses nouvelles. Soit 8,25 milliards pour le chômage partiel. Cela permettra à beaucoup d’entreprises de ne pas payer leurs personnels pendant la crise. C’est l’Etat et l’Unedic (pour 2,75 milliards) qui paieront. L’Unedic aura des dépenses supplémentaires d’indemnisation du chômage. Il ne faudrait pas le gonflement de son déficit soit utilisé comme prétexte l’année prochaine pour réduire les prestations. Au contraire, il faut abolir définitivement les mesures qui prévoyaient une baisse des allocations.

Les dépenses supplémentaires prévues au titre de la santé sont limitées à 2 milliards, pour les achats de matériel, les indemnités journalières et le soutien aux personnes hospitaliers, ce qui est ridiculeusement insuffisant. La crise en cours atteste des effets délétères d’années d’austérité infligées au système de santé, qui ont conduit à une dégradation du fonctionnement des hôpitaux et à une baisse de la recherche médicale. Il faut annoncer tout de suite une ambitieuse Loi de programmation pluriannuelle pour la santé et en particulier pour l’hôpital et ses personnels et dégager immédiatement des sommes importantes.

En face de ces 2 milliards, le gouvernement prévoit 30 milliards d’allègement de trésorerie pour les entreprises par des délais de paiements pour les impôts et les cotisations sociales et 300 milliards de garantie de dette. Les entreprises sont bien servies par rapport aux hôpitaux. Les petites entreprises bénéficieront d’un fonds de solidarité de 1 milliards et pourront ne pas payer leurs loyers et leurs fluides. Une telle facilité n’est pas offerte aux ménages précaires.

Le gouvernement envisage la nationalisation de certaines entreprises en difficulté. Certes, il faut sauver ces entreprises, leurs emplois, leur capital technologique. Mais, ce doit être l’occasion de repenser leurs stratégies. Les grandes entreprises ne doivent plus être gérées dans l’optique des actionnaires, mais dans celle de l’emploi, de la cohésion sociale et de la transition écologique. La privatisation d’ADP devrait être définitivement abandonnée et Engie, entreprise importante pour la transition écologique, devrait être nationalisée.

Sous prétexte de ne pas nuire à l’activité économique, le gouvernement s’est refusé à prendre des mesures à la hauteur de la crise ; arrêter toutes les productions non indispensables ; mobiliser les entreprises pour fabriquer du gel, des masques, des tests, des ventilateurs ; réquisitionner des logements pour les SDF et les migrants ; aider les précaires. Au contraire, il impose à certaines entreprises de continuer leur activité même non indispensable, sans pouvoir assurer aux salariés les protections nécessaires, puisque, du fait des politiques d’économies budgétaires, la France manque de gel, de masques, de tests.

La crise est aussi un révélateur des injustices sociales. Les cadres bien payés peuvent rester chez eux, sans perte de salaire, en bénéficiant du télétravail, tandis que des travailleurs sont contraints d’aller travailler sans les protections indispensables. Ne faudrait-il pas que la hiérarchie des salaires reflète l’utilité des emplois telle que la crise les révèle ?

Le gouvernement va autoriser les entreprises à prélever une semaine de congés payés sur la période de confinement, à fixer unilatéralement les jours de RTT et des comptes-épargne temps. Dans de nombreux secteurs, les entreprises pourront aussi déroger aux règles concernant la durée du travail et le repos hebdomadaire. Elles pourront faire travailler leurs salariés 60 heures certaines semaines ; 48 heures en moyenne sur 12 semaines. Certes, la mobilisation de tous peut être nécessaire dans certaines entreprises, dont la production est indispensable. Mais cette mobilisation nécessaire devrait être organisée avec les salariés et leurs syndicats et non imposée. La démocratie sociale n’est pas dans l’ADN de ce gouvernement. Et par ailleurs, pourquoi ne pas embaucher ?

Le gouvernement prévoit un gonflement du déficit public qui passerait de 2,2% à 3,9% du PIB. Il ne faut pas réclamer moins de déficit, mais au contraire en demander plus, si nécessaire. Tout en rappelant que l’instabilité économique induite par la financiarisation justifie la juste taxation des revenus financiers (donc l’abolition du prélèvement forfaitaire unique) et des patrimoines financiers (donc la reconstitution de l’impôt de solidarité sur la fortune). De même, l’aide apportée aux entreprises en difficulté justifie le maintien d’un taux satisfaisant de l’impôt sur les sociétés. Si la collectivité prend en charge les pertes, elle doit aussi bénéficier des gains des entreprises en période faste.

À la sortie de la crise, le gouvernement et le patronat voudront relancer l’économie telle qu’elle était. Nous devrons nous mobiliser pour imposer un changement d’objectif : passer à une économie sobre, solidaire, soutenable dans la durée. La crise sanitaire témoigne de la nécessité d’accélérer la transition écologique et sociale.

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Henri Sterdyniak, signataire du manifeste des économistes atterrés, dissèque les choix économiques des gouvernants, débusque la propagande néolibérale et dévoile la logique prédatrice des multinationales.

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