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Nos étudiants sont au bord du gouffre

À Lyon, ce jeudi 21 Janvier, Mathias tire la sonnette d’alarme. Détresse psychologique, décrochage scolaire, grande précarité : pour cette syndicaliste, militante chez Solidaires, la situation des étudiants est critique. "Il y a une recrudescence des étudiants qui vont chercher de l'aide au Secours populaire ou aux Restos du Cœur. Les questions de stress financier, c'est le premier facteur qui fait échouer les étudiants. De plus, beaucoup n'ont que leur téléphone pour suivre le cours, ou n'ont pas de bonne connexion Internet, alors qu'est-ce qu'on fait ? Ici, à Lyon, on a eu deux tentatives de suicide, et Madame Frédérique Vidal s'est exprimée sur l'incendie d'un gymnase à Nantes. Nos vies valent plus que des gymnases", s'insurge-t-elle.

Aujourd’hui, elle se rend à la manifestation et réclame différentes mesures pour les grands oubliés de la crise que sont les étudiants. Dont la réouverture des universités, avec de vrais moyens pour respecter les mesures sanitaires. Mais aussi une revalorisation des bourses ou la création d’un salaire étudiant qui devient aujourd’hui une urgence.

À midi, la manifestation commence devant la Manufacture des Tabacs. Après celle de Paris, les étudiants lyonnais comptent bien faire entendre leur voix, alors qu’Emmanuel Macron est en déplacement à l’Université Paris-Saclay. Des slogans sont criés avec force : "Étudiants sacrifiés, y'en a marre de galérer". Emma-Lise, étudiante en fac de lettres, vit dans une petite chambre du Crous. Si elle arrive à joindre les deux bouts grâce à l'aide de ses parents, elle pense à tous ceux qui n'ont pas cette chance, et notamment aux étudiants étrangers, qui sont loin de leur famille.

Après deux heures de marche, le cortège s’arrête devant le Crous de Lyon pour rendre hommage aux étudiants qui ont tenté de mettre fin à leurs jours, dont Anas, qui s’est immolé l’année dernière ici-même. "On fait du bruit devant le Crous car aujourd'hui il est important de penser à nos camarades qui ont tenté de mettre fin à leurs jours, des camarades déprimés, isolés. On leur dit « Solidarité ».", annonce Mathias au mégaphone.

Une précarité qui touche aujourd’hui des jeunes jusqu’alors épargnés. Selon l’Observatoire national de la vie étudiante, un tiers des étudiants auraient perdu leur travail depuis mars, représentant une perte en moyenne de 274 euros par mois. C'est le cas d'Innocent, étudiant en troisième année de Droit-Sciences politiques. "Je suis l'un de ces étudiants qui a besoin de travailler pour subvenir à ses besoins, mais aujourd'hui du travail il n'y en a pas, j'ai envoyé 150 CV, je n'ai aucune réponse. Je pense aussi aux jeunes qui étaient étudiants l'année dernière et qui sont entrés dans un marché du travail atone. C'est pour tout ce monde-là qu'on demande de l'aide tout de suite, pas dans 6 mois, tout de suite, car après ce sera trop tard."

À 15h, le cortège arrive devant le rectorat de Lyon. Différents étudiants prennent alors la parole. Pour beaucoup, ils dénoncent des conditions de travail intenables, souvent liées à des appartements exigus, mais aussi à des cours en distanciel qui ne sont plus gérables. "J'ai 35 heures de cours par semaine, donc je suis 35 heures enfermée chez moi dans la semaine. J'ai aussi des problèmes de connexion, on a tous nos problèmes. On demande la réouverture des facs, et bien sûr on est conscients de la situation sanitaire actuelle, mais on demande que des moyens soient mis en place pour respecter les distanciations sociales et reprendre les cours en présentiel", témoigne Houda, étudiante en troisième année de Droit-Sciences politiques.

À l’Université actuellement, il faut compter un psychologue pour 30 000 étudiants. Si la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, a annoncé vouloir doubler le nombre de praticiens, les moyens se font toujours attendre. "Pour moi c'est très dur, ce sont des insomnies, énormément d'angoisses, je remets mon avenir en question. C'est d'autant plus difficile en tant que première année, parce qu'on n’est restés qu'un mois et demi à la fac, on n’a aucune notion de ce qu'est l'Université. Parfois il m'arrive de pleurer, d'avoir des idées noires, c'est vraiment très dur", confie Nicolas, en première année de licence d'Histoire.

Ce jeudi 21 Janvier , Emmanuel Macron a annoncé le retour en présentiel un jour par semaine dans les universités, et l’accès à deux repas à un euro par jour pour tous les étudiants. Quelques avancées pour une jeunesse abandonnée, qui commence à être prise en compte près d’un an après le début de la crise. Une nouvelle manifestation aura lieu mardi 26 Janvier.

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