Chaque semaine, Serge Faubert raconte l’actualité française à travers le prisme des délibérations au Sénat et à l’Assemblée nationale. Ce qui perce de l’esprit des lois et de l’équilibre des forces politiques, au-delà du jeu des petites phrases.
Déconfinement : il y a vraiment de quoi avoir peur
A quelques jours du déconfinement, le message du gouvernement reste brouillon. Le Premier ministre semble douter de son propre plan. Ce qui n’est pas pour rassurer l’opinion.
La France a peur. Et elle a raison d’avoir peur. Car le Premier ministre lui- même ne croit pas à son propre plan de déconfinement. Sommé par le président de la République de remettre en marche le pays, il est venu, mardi, chercher le soutien des parlementaires. Alors qu’il n’y était pas tenu.
Mais Édouard Philippe voulait un vote. Le chef du gouvernement n’entend pas porter seul la responsabilité d’une éventuelle catastrophe sanitaire. Il sait ce que le scandale du sang contaminé a coûté à Laurent Fabius. Sans doute la possibilité de prétendre à l’Élysée.
Edouard Philippe avance donc à reculons sur le déconfinement. Au point, d’ailleurs, qu’il s’est laissé la possibilité d’y renoncer à la dernière minute si les indicateurs sont mauvais.
Pas question, encore, d’ouvrir toutes les portes et fenêtres d’un coup. Emmanuel Macron ne voulait pas entendre parler d’un déconfinement progressif, région par région ou département par département. Édouard Philippe a passé outre. Le premier ministre a opté pour un déconfinement par paliers, territoire après territoire. La politique des petits pas.
Mais pourquoi Édouard Philippe prendrait-il des gants ? Le sort du Premier ministre est scellé depuis l’intervention du président, le 13 avril. Depuis cette petite phrase : « Le moment que nous vivons est un ébranlement intime et collectif. (…) Sachons, dans ce moment, sortir des sentiers battus, des idéologies, nous réinventer – et moi le premier. »
Se réinventer ! Quand un président se réinvente, il commence par changer de Premier ministre.
Édouard Philippe sait que ses jours sont comptés. Depuis la réforme des retraites, le fossé n’a cessé de s’élargir entre lui et le Président. Alors il fait le job. Sans conviction excessive. Mais avec le souci de ménager l’avenir.
Dans ces conditions, peut-on lui faire confiance ? La gestion chaotique de ces dernières semaines, notamment sur les masques, en dissuade. Le déni, les mensonges, les revirements doctrinaux ont plongé l’opinion dans un scepticisme anxiogène. Même si le principal responsable de la situation réside à l’Élysée, le bilan de son Premier ministre reste consternant.