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La chronique éco

Henri Sterdyniak, signataire du manifeste des économistes atterrés, dissèque les choix économiques des gouvernants, débusque la propagande néolibérale et dévoile la logique prédatrice des multinationales.

Grand Débat : du blabla, aucun résultat

Baisse des prestations sociales, accroissement des inégalités : pour répondre aux revendications des Gilets Jaunes, Emmanuel Macron a lancé le Grand Débat National. Il s’est soldé par un véritable fiasco, détaillé par l’économiste atterré Henri Sterdyniak dans ce nouvel épisode de la Chronique Éco.

Le mouvement des Gilets Jaunes a montré l’étendue du mécontentement d’une partie importante de la population qui a le sentiment d’être méprisée par les classes dirigeantes, oubliée par les services publics, précarisée par la disparition des emplois stables correctement payés, paupérisée par le bas niveau des salaires et des prestations sociales et, de plus, surchargée d’impôt par la hausse de la CSG pour les retraités et celle de l’énergie pour l’ensemble de la population. Pour canaliser ce mouvement, le gouvernement a eu recours à trois instruments : le bâton de la répression policière, la carotte des 10 milliards de hausses de prestations, de réductions d’impôts et la parade d’un grand débat national. Dès le début, ce grand débat national a été dévoyé. Les thèmes et les questions ont été soigneusement choisis par le gouvernement. Emmanuel Macron a saisi l’occasion pour effectuer une tournée électorale dans les régions françaises. Le gouvernement utilise maintenant le grand débat pour relancer son objectif de toujours : mettre en cause le modèle social français. Ainsi, Édouard Philippe prétend répondre à l’exaspération fiscale des Français en baissant les impôts, ce qui lui fournit une justification pour s’attaquer aux dépenses publiques et sociales. La suppression de l’ISF et le prélèvement forfaitaire unique ont déjà réduit de 5 milliards la contribution des plus riches aux dépenses publiques ; la réduction des cotisations salariales met en cause la capacité et la légitimité des syndicats à gérer l’Unédic ; la suppression de la taxe d’habitation affaiblit l’autonomie financière des communes. Il est maintenant question de supprimer la redevance audiovisuelle (et donc de pratiquer des coupes claires sur l’audiovisuel public). Il est question de diminuer l’impôt sur le revenu, déjà très faible en France, alors que c’est le seul impôt progressif, le plus juste, le plus redistributif. Généralement, la baisse des impôts profite aux riches et affaiblit la cohésion sociale. Des exigences fortes se sont exprimées dans le mouvement des Gilets Jaunes comme à travers le grand débat. Il s’agit d’abord de réclamer davantage de services publics, qui seraient plus proches des usagers, en terme géographique et en terme de fonctionnement. Cette exigence se manifeste particulièrement dans l’accès à un médecin ou à un hôpital, pour la qualité des services en EPHAD. Ce sont surtout des demandes de justice fiscale : rétablissement de l’ISF, tranches supplémentaires pour l’IR, baisse de la TVA sur les produits de première nécessité et hausse sur les produits de luxe, suppression des niches fiscales profitant aux plus riches, lutte contre l’optimisation fiscale des entreprises multinationales, extension de la fiscalité carbone aux grandes entreprises, aux transports aériens et maritimes, remise en cause de la hausse de la CSG sur les retraites et de leur désindexation. Les Français ont pris conscience de la nécessité du tournant écologique ; de la nécessité de changer de mode de vie, de protéger l’environnement. Ils réclament des investissements publics pour les transports collectifs ou la rénovation des logements. Ils refusent par contre que les économies d’énergie soient imposées aux plus fragiles par une fiscalité écologique aveugle. Le gouvernement a soigneusement évité d’introduire des thèmes portant sur les entreprises dans le grand débat. Il n’y a guère eu de mise en cause des modalités de fonctionnement des entreprises, de la financiarisation, de la mondialisation, de l’UE telle qu’elle est. Les questions du chômage ou de la précarisation de l’emploi ne sont guère apparues. En sens inverse, le discours présidentiel sur la France, nation start-up, n’a pas été repris par les contributeurs. Le grand débat a montré la profonde méfiance des Français envers les élites, la technocratie et les hommes politiques. Il en résulte une demande d’intervention directe des citoyens, sous la forme du référendum d’initiative citoyenne, de la prise en compte du vote blanc, d’assemblées de citoyens tirés au sort. N’oublions pas cependant le rôle des organisations politiques, syndicales ou citoyennes pour mobiliser les salariés ou les citoyens, pour élaborer des programmes de transformation sociale et économique. Comptons sur le mouvement social pour se mobiliser et éviter que le gouvernement n’utilise le « grand débat » pour accentuer sa politique et enfoncer la France dans l’impasse néolibérale.

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Henri Sterdyniak, signataire du manifeste des économistes atterrés, dissèque les choix économiques des gouvernants, débusque la propagande néolibérale et dévoile la logique prédatrice des multinationales.

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