Denis Robert reçoit des citoyens engagés, lanceurs d’alerte, intellectuels… Pour des entretiens à bâtons rompus dans lesquels le tutoiement est de mise et dont le présupposé admis par tous est que tout peut arriver.
"Nous devons être des policiers républicains et non des mercenaires"
La police a mauvaise presse. Elle casse du noir à Minéapolis, elle éborgne et tue aussi à Paris, Nantes ou Marseille. Le préfet Lallement vit son moment de gloire. Le ministre Castaner semble beaucoup écouter les syndicats qui passent beaucoup à la télé dans des émissions complaisantes. Bien qu’éparpillés, ces syndicats très catégoriels tiennent leurs troupes et obtiennent le paiement de primes anciennes. Mais tout est peut-être en train de craquer…
De plus en plus de tribunes sont publiées ça et là appelant à un sursaut républicain. L’invité de ce soir, un jeune retraité de 62 ans, Jean Louis Arajol, a été le premier à taper du poing dans une lettre ouverte qui a fortement déplu place Beauvau.
Cet ancien secrétaire du SGP, syndicat général de la police qui était le syndicat majoritaire avant l’éclatement entre plusieurs branches et sous branches nous raconte pendant près de 90 minutes sa vision d’une police où beaucoup en prennent pour leur grade à commencer par Christophe Castaner : « Vous imaginez Charles Pasqua aller en boîte après une journée comme celle des Gilets Jaunes aux Champs Élysées ? » ou le Préfet Lallement : « Il est plus proche de Papon que de Confucius ». L’ancien major, médaillé d’honneur de la police par Jacques Chirac, appelle à une révolte de ses pairs et à ne plus servir de mercenaires à un État « en désaccord avec son peuple ».
« On va vers une recomposition du paysage syndical avec tout ce qui va se passer demain… La fin du confinement, les nouvelles manifestations vont encore demander beaucoup d’efforts aux policiers. C’est là que nous aurons besoin de retrouver ceux que nous avons perdus. Il nous faudra des policiers républicains et ça existe » explique-t-il à Denis Robert. « Les flics sont les bouc émissaires d’un manque de concertation de l’État qui veut faire passer ses réformes au forceps… Le peuple n’est pas d’accord, mais l’État s’en fout car il envoie les flics. Et ça c’est inadmissible ! la police n’a pas aujourd’hui à servir de garde prétorienne à un État qui prend des décisions illégitimes. C’est aussi simple que cela ».
À l’écouter, on se dit que la maison Poulaga est en feu et que tout est à revoir : formation, statistiques bidonnées, encadrement borné, atteinte aux libertés, LBD à interdire, tabassage du petit peuple : Jean Louis Arajol sort la sulfateuse. Son raisonnement et ses exemples apparaissent implacables : « La police est issue du peuple et elle n’a pas à s’en dissocier. Rien qu’une phrase comme celle-là vaut de l’or, assène-t-il. Moi à la place des syndicalistes en poste, j’irais voir le Préfet Lallement et Christophe Castaner et je leur dirais « Je vous préviens, les choses ne se passeront pas comme ça. Cette fois, on veut un changement de doctrine, on ne veut pas la guerre mais le maintien de l’ordre. Et si on ne nous écoute pas, on rentrera nous aussi dans l’arène sociale aux cotés des infirmières et des pompiers. »