Chaque semaine, Serge Faubert raconte l’actualité française à travers le prisme des délibérations au Sénat et à l’Assemblée nationale. Ce qui perce de l’esprit des lois et de l’équilibre des forces politiques, au-delà du jeu des petites phrases.
Macron / Kohler : la justice aux ordres du pouvoir
Une fois encore, nos confrères de Médiapart ont fait mouche. Mardi, le site d’investigation a révélé qu’Emmanuel Macron était intervenu, en juillet 2019, pour faire cesser l’enquête que menait le Parquet national financier sur un de ses collaborateurs.
Ce collaborateur, c’est Alexis Kohler, le secrétaire général de l'Élysée. Un des quatre hommes qui dirige le pays. Les trois autres étant le Président, le Premier ministre et le directeur de cabinet de ce dernier.
Alexis Kohler est soupçonné de conflits d'intérêts en raison de ses liens avec l'armateur italo-suisse MSC. Ce groupe est en effet dirigé par des cousins de sa mère.
En 2010 et 2011, alors qu’il siégeait en tant que représentant de l’État au Conseil de surveillance du Grand port maritime du Havre, Alexis Kohler a approuvé des contrats avec MSC.
En juin 2018, le Parquet national financier a ouvert une enquête préliminaire pour conflit d’intérêts et prise illégale d’intérêts.
La suite, c’est Ugo Bernalicis qui la raconte. Le député de la France insoumise interpelle la Garde des sceaux lors des questions au gouvernement. Et rappelle la chronologie ahurissante de l’année 2019 :
« Le 30 juin dernier, Éliane Houlette, procureure nationale financière, part à la retraite. Le 1er juillet, Muriel Fusina est désignée par la procureure générale, madame Champrenault, contre l’avis de madame Houlette pour faire son intérim. Contre l’avis de madame Houlette. C’est la même madame Champrenot qui est mise en cause dans le cadre de l’affaire Fillon pour les pressions hiérarchiques qu’elle a fait subir à Eliane Houlette.Le même 1er juillet, Emmanuel Macron joint au dossier Alexis Kohler une lettre manuscrite de sa part visant à absoudre monsieur Kohler des chefs d’inculpation dont il faisait l’objet dans le dossier MSC. Le 18 juillet, le procès verbal des policiers, le PV de synthèse est modifié en conséquence, et le 21 août alors que nous sommes toujours dans la période d’intérim du Parquet national financier, il y a un classement sans suite alors qu’il n’y a pas d’urgence dans cette affaire et que le nouveau procureur n’est pas nommé.Madame la garde des Sceaux, madame la ministre, du fait des remontées d’informations dans les affaires sensibles,étiez-vous au courant de cela ? Etiez-vous au courant que le président de la République, censé être garant del’indépendance de l’autorité judiciaire au titre de l’article 64 de la Constitution, était intervenu directement dans un dossier individuel. Etes-vous prête à ouvrir une enquête de l’inspection générale de la justice ? »